Conseil en innovation stratégique

#Sociobang : le Commerce Hyper-Lieu

Dans son nouvel et passionnant ouvrage, Hyper Lieux (Seuil, 2017), Michel Lussault développe un concept fleuve, éminemment fécond pour le commerce : l’« hyper-lieu », qui caractérise selon lui la manière la plus contemporaine de « faire lieu » dont de « faire société ». Or, « faire lieu » (pour faire lien) est par essence la vocation du commerce, pour en revenir à la définition de Claude Lévi-Strauss : un échange de biens et de services, un échange de paroles, un échange de corps, c’est-à-dire un moyen de rencontrer d’autres personnes.

Cet hyper-lieu réconcilie deux processus en tension, que nous avons naturellement tendance à opposer, l’uniformisation (mondialisation) et l’hyper-localisation : l’hyper-lieu et à la fois global et local.

5 critères le définissent : (1) il est intense, par le regroupement d’activités (commerce, tourisme, loisir, finance…) ; (2) il est connecté, et permet de connecter les individus et les choses qui y sont assemblés à d’autres (cf. ubiquité médiatique de Times Square) ; (3) il est pluri-scalaire, car il imbrique simultanément plusieurs échelles géographiques (le global, le local) ; (4) il constitue un espace d’expériences partagées ; (5) il est créateur de familiarité et d’affinité avec autrui.

Si l’on passe à ce filtre les nouveaux concepts / lieux commerciaux à succès, tous présentent sans surprise les caractéristiques de l’hyper-lieu : depuis la nouvelle génération de centre-commerciaux, à l’image de Vill’Up, en passant par du commerce spécialisé à l’instar de Warby Parker, d’Eataly ou du nouveau concept d’Apple Store, lieux d’expériences affinitaires, connectés, pluri-scalaires et implantés dans des zones de regroupement d’activités. Il s’étend également à l’analyse des espaces et (hyper-)lieux en ligne, pensons notamment à Etsy.

‽ Après des années d’uniformisation, il est temps pour le commerce d’opérer un retour aux sources – c’est-à-dire au lien – à l’heure où se cristallise l’idée que l’accomplissement de soi passe par la relation à l’autre et où volonté est croissante de retrouver de la reconnaissance sociale / de la filiation . Ce concept d’hyper-lieu se révèle une grille d’analyse / de travail très opératoire pour encapsuler les transformations à l’œuvre dans notre manière de « faire lieu » donc de « faire commerce » et opérer ce retour aux sources actualisé.