Conseil en innovation stratégique

Après le Wei-Ji chinois, le Wabi-Sabi japonais

Innovation for Good (News) #49

Vous pourrez toujours compter sur Tilt ideas pour vous faire voyager. Nos veilles internationales servent à cela. Aujourd’hui le Japon.

Les canons de l’esthétique japonaise peuvent parfois paraître surannés mais s’il est un principe qui puisse correspondre à notre époque post Covid, c’est bien le kanso.  Signifiant « simplicité », « sobriété » ou encore « pureté », il s’accorderait parfaitement aux envies d’essentialité issues de la prise de conscience personnelle mais également professionnelle due à cet agent transformateur qu’est la Covid-19.

Le kanso fait partie des sept principes de la philosophie zen qui permettent d’atteindre le wabi-sabi, c’est-à-dire un état de conscience de l’imperfection et l’impermanence des choses. A ses côtés, on trouve les concepts de fukinsei (asymétrie), koko (pâtine), shizen (naturel), yugen (grâce subtile), datsuzoku (liberté) et seijaku (tranquillité). Ces principes se trouvent dans la nature mais également dans le caractère et le comportement humain. Il suffirait donc de s’y reconnecter.

De manière plus opérationnelle, le kanso peut être traduit comme l’élimination du désordre au profit de la sobriété. Une règle que s’est appropriée Marie Kondo, une essayiste japonaise devenue célèbre grâce à sa méthode de rangement qui préconise de se séparer de tous les objets ne procurant pas de la joie. Ce qui compte dans l’application du kanso à la vie quotidienne, c’est de ne pas penser en termes de décoration mais en termes de clarté. Il faut donc omettre ou exclure tout ce qui n’est pas essentiel.

Ceux d’entre nos lecteurs qui se sont rendus au Japon le savent, l’intérieur japonais a toujours été organisé selon le kanso : l’espace y est souvent limité, avec peu de pièces partagées par plusieurs membres d’une même famille et peu de rangements. Lorsque l’on y ajoute un paramètre comme celui de la menace constante des catastrophes naturelles qui fait du Japon le pays de l’impermanence (et donc de l’innovation), on comprend mieux qu’il vaut mieux ne pas trop posséder afin d’avoir moins à perdre.

Simplifier permet aussi de mieux apprécier. Ainsi, l’espace vide -ou “ma”- revêt une importance fondamentale dans l’esthétique du kanso.  Le vide, combiné à la sobriété et la présence de peu d’éléments dans une pièce, attire l’attention sur ce que l’on souhaite mettre en valeur. Souvent au Japon, cela se traduit par un grand dépouillement comme un unique vase avec quelques tiges arrangées selon les règles de l’ikebana, ou un seul rouleau de calligraphie accroché au mur.  Le champ d’application du kanso est si vaste qu’il peut concerner aussi les cosmétiques, ce qui donnerait sa spécificité à la J-Beauty, le rituel de beauté japonais, qui met l’accent sur la simplicité des produits et la sobriété du résultat.

Inno for Good ? Oui car s’il y a bien une leçon tirée de la pandémie révélée lors de la phase 1 de notre démarche de prospective Neoxygen (60 entretiens de dirigeants multi-marchés), c’est l’effarante complexité des organisations, process et offres existant.e.s. Et si innover for good consistait désormais à simplifier partout ? Vous reprendrez bien un peu de wabi-sabi avant de partir en vacances ?

Brice Auckenthaler, Co-Founder 

(Crédits : Sarah Dorweiler)