Conseil en innovation stratégique

#Sociobang : L’Homme sans Gêne, ça Gêne ?

La prospective telle que Tilt ideas la pratique est l’art de combiner plusieurs signaux faibles pour en faire une tendance [laquelle s’affirmera ou s’effondrera]. Cette combinaison fait correspondre, converger, et en quelque sorte converser ces signaux tels des rhizomes, créant ainsi une arborescence créatrice de sens, incarnée alors en un scénario du futur.

Aujourd’hui 5 repérages complémentaires, issus de nos veilles yeux et oreilles grands ouverts, traitent simultanément d’un même thème dystopique : la disparition de l’humanité du fait de ses propres actions.

Le premier signal d’alerte fut le roman « Station Eleven » de la Canadienne Emily St.John Mandel qui signait cet automne une fresque post-apocalyptique façon  »La Route » [Cormac McCarthy – 2006]. Elle y met en scène une poignée d’individus errant dans un monde dévasté suite à une épidémie de grippe mortelle.

Dans la BD « Shangri-La » de Mathieu Bablet, cette même humanité est petit à petit dissoute dans le cosmos suite à la création d’humanoïdes par une entreprise tentaculaire [Tianzhu Corp, sorte de GAFA du 4ème millénaire]. Dans « L’Univers sans Homme, les Arts contre l’Anthropocentrisme », Thomas Schlesser retrace sur deux siècles et demi une histoire de l’art où l’humanité s’est absentée des œuvres. L’auteur y évoque les artistes ou écrivains tels que Caspar David Friedrich, Turner, Pierre Huyghe, Yves Klein, Lucio Fontana, Fabien Giraud, Raphael Siboni ou Maxime Bondu, qui -chacun à sa façon- traitent de bioéthique ou de transhumanisme. Et plus précisément de la pulvérisation de l’homme, dissous dans la nature après s’être lui-même dissous dans la surabondance de la production d’objets. En refermant l’ouvrage, on se dit que c’est très beau, en fait, un monde sans l’homme. L’homme sans gêne qui pollue [esthétiquement, commercialement, environnementalement…], oui, ça gêne.

Avec une autre BD « Otto, l’Homme réécrit », Marc-Antoine Mathieu, va même plus loin en se demandant si nous-même ne serions pas qu’une illusion. A l’instar de  »Truman Show » il y a quelques années, la vie décrite questionne la liberté [tout est-il prédéterminé, y compris la catastrophe finale ?]. Enfin, 4ème signal faible, le film « Salt & Fire » du cinéaste Werner Herzog sorti en décembre et qui suit les traces de Lars Von Trier [ »Melancholia – 2011] à travers une complainte dans le désert de sel de Bolivie [[le film devait se tenir initialement dans la mer d’Aral en Asie Centrale, également asséchée du fait d’un consortium pétrolier, alors qu’elle constituait le 4ème plus grand lac au monde il y a 50 ans]. La disparition de l’homme du fait de ses propres exactions ne serait pas si tragique si elle ne signifiait pas l’évanouissement du seul témoin capable de profiter de la magnificence de la Terre.

‽  Un monde sans l’homme, demain, est-ce un monde sans point de vue ? En termes de scénario planning , une dystopie décrit ce que Tilt ideas appelle un scénario noir [celui qui n’arrive jamais mais qui sert à exprimer une anxiété vis-à-vis du monde contemporain et notre ambivalence à l’égard notamment de la technologie.] Il cache souvent une critique de notre temps. Et si demain les mégalopoles étaient invivables comme dans Blade Runner ? Et si le métro du futur était le seul moyen de locomotion hyper sécurisé ? Et si en 2030 l’hypermarché as we know it était déserté par les Millenials ?

Mais rassurez-vous, la plupart des histoires [cf. Independance Day, Le Jour d’Après…] se terminent bien, au prix d’une fin du monde qui ressemble souvent à un parc d’attraction. N’en reste pas moins vrai qu’il est exaltant de pouvoir penser ce qui nous dépasse et de voir la modicité humaine en regard de l’infini cosmique…

Pas très réjouissant en ce début d’année 2017 ! Tilt ideas vous promet un Sociobang plus enthousiasmant le mois prochain…