Conseil en innovation stratégique

Tilt Attitude #15 : Le triomphe du clash (2/2)

GILLETTE, une pub pas rasoir !

Deux exemples de marques qui optent pour un story telling plus engagé.

 

Après Storytelling paru en 2007, Christian Salmon vient de publier L’Ere du Clash.

Le message de cet ouvrage ? C’est la fin du storytelling, qui embarque dans une histoire et tient en haleine dans le temps. Nous voici venus dans l’ère du clash, éruptif et erratique, qui ne répond à d’autre logique que celle d’émerger au-dessus de la mêlée, sans programme ni projet. Symbolisée par Trump et ces tweets expéditifs, la logique du clash pulvérise la traditionnelle mise en récit.  Si l’analyse de Christian Salmon est centrée sur la politique que peut-on en déduire pour les marques ?

A l’instar d’un Barack Obama recruté chez Netflix pour produire des histoires de séries télévisée, le story telling n’est pas mort, il se transforme :  plus clivant et engagé que jamais.

Fin 2018 d’abord, il y a eu Nike et « l’affaire Kaepernick ». Colin Kaepernick, ce joueur de football américain choisi en égérie par la marque à la virgule, après avoir protesté contre les violences racistes policières aux Etats-Unis. En s’agenouillant lors des hymnes nationaux avant chaque match de NFL, son attitude avait suscité une forte polémique et il s’était attiré les foudres et quolibets de Donald Trump.

Malgré les nombreux appels aux boycotts, le choix et la prise de position de la campagne a généré une très forte hausse de la fréquentation du site internet et des interactions sur les réseaux, permettant à Nike de trouver son public auprès des jeunes et des non-Blancs aux Etats-Unis.

Début 2019 c’est Gillette qui se (re)positionne. La marque diffusait le 13 janvier dernier son nouveau spot publicitaire intitulé « Believe ». Une vidéo regardée depuis, plus de 29 millions de fois sur Youtube et avec 774k « likes » et 1,4M « dislikes », le moins que l’on puisse dire, c’est que cette vidéo divise.

Pourquoi ? En lieu et place des messages publicitaires classiques et stéréotypés du mâle viril, la marque prône un message différent : celui de la masculinité responsable et bienveillante.  Le slogan de la marque évolue et se transforme :  The best a man can get devient The best a man can be.

La promesse ne s’arrête pas au slogan de campagne, Gillette s’engage à donner 1 million de dollars par an, pour les 3 années à venir, à des initiatives américaines à but non-lucratif visant à inspirer, éduquer et aider les hommes de tous les âges à atteindre leur « mieux » et à devenir des modèles pour les générations futures

Et c’est bien la question de l’être qui divise tant, car pour la première fois, une marque incite les hommes à changer non pas seulement de produit mais de comportement, vis-à-vis notamment, des femmes. A l’heure du mouvement #Metoo qui polarise le débat politique américain, le message divise.

Si journaliste anglais Piers Morgan, dénonce de « pathétiques assauts globalisés contre la masculinité. », d’autres affirment que Gillette fait de la propagande féministe. De nombreuses personnalités conservatrices s’indignent sur Twitter : certains hommes se sont sentis insultés, répudiant la marque à jamais.

On le voit, le triomphe du clash, c’est chercher à faire du bruit, beaucoup de bruit quitte à déplaire et polariser son audience. Bref, ce n’est plus l’histoire qui compte, c’est l’écho qu’elle suscite.

‽ Et vous, comment votre entreprise s’engage-t-elle ? Comment sortir du lot et faire entendre sa voix à l’ère du « clash » ?

Marie Juin, Consultante Senior