Conseil en innovation stratégique

La gratuité, nouvelle monnaie du futur?

La génération Y est une génération souvent traitée de « profiteuse » car trop habituée à la gratuité particulièrement dans son rapport au contenu multimédia. Ces enfants gâtés biberonnés au téléchargement illégal et au règne de l’illimité refusent aujourd’hui de payer pour de la musique ou de l’information comme le prouve la profonde crise que traverse l’industrie musicale qui se bat pour la reconnaissance du droit des auteurs et leur juste rémunération pour leurs titres. La solution à ce problème est en train d’émerger petit à petit avec le lancement de sites « produit d’appel » selon une stratégie dite de « Freemium » : un produit gratuit en appelle un autre, à contenu plus intéressant et réellement illimité, lui payant (Spotify, Deezer, sites comme Le Monde.fr avec des contenus « abonnés » et même LinkedIn avec la solution « Premium » qui permet de contacter des personnes hors de son réseau).  Internet a ainsi révolutionné notre rapport à un certain nombre de biens et a bouleversé chaînes de valeur et business modèles du passé. Comment la gratuité va-t-elle évoluer dans le futur ?

1. La gratuité liée à l’économie collaborative en réponse à un trop-plein consommatoire, à une crise des valeurs causée par les difficultés économiques et une défiance généralisée  :

La quête de sens (à tous les niveaux) et de lien social pousse de plus de plus de personnes à rejoindre cette économie de partage en plein essor pour tenter de redéfinir un modèle de consommation plus équitable et durable. Des sites de partage (voiture, électroménager, savoir-faire) aux gratiferias, les initiatives pullulent. Incroyables comestibles distribue des légumes cultivés dans des jardins partagés gratuitement tandis que Sharewizz est un système de prêt contrôlé en ligne pour échanger des objets utilitaires entre particuliers.

« Ce qui reste gratuit est le plus important pour le bien-être, la justice, l’accès au vivant » (Vincent Liegey, doctorant en économie et fondateur du Parti de la Décroissance). L’économie de partage de demain, cela pourrait être de décider démocratiquement (donc collectivement) de ce qui doit devenir accessible pour tous au même titre que l’eau potable aujourd’hui dans les pays développés : énergie, alimentation, certains services publics ? Des municipalités ont déjà implémenté la gratuité des transports, comme Aubagne en 2008 (Bouches-du-Rhône). Le tout est d’inventer le bon business modèle afin que le coût ne soit plus supporté par les utilisateurs mais que le système reste rentable.

2. La gratuité dans l’accès plus classique aux biens et services (comme le contenu multimédia)

Le modèle idéal pour soutenir cette gratuité n’est pas encore complètement abouti mais il semble que la gratuité va bel et bien devenir la norme. Il existe aujourd’hui plusieurs nouveaux business modèles autour de la gratuité (car ne soyons pas dupes, quand un produit est dit gratuit, il y a toujours quelqu’un qui paie, grâce à une forme de « subventions croisées ») :

– le produit d’appel (Freemium) comme expliqué ci-dessus

– l’effet réseau (plus les utilisateurs sont nombreux, plus le service est utile sur les réseaux sociaux donc le service doit passer par une phase de gratuité pour recruter des utilisateurs dans un premier temps)

– le marché à deux versants : l’annonceur débourse à la place du lecteur (contenus payés par la publicité : presse en ligne gratuite, moteurs de recherche, réseaux sociaux…)

Il reste un dernier modèle, et celui-ci est au cÅ“ur des débats car il effraie : la gratuité en échange de données sur les individus et leurs habitudes puis leur partage entre entreprises. « Rien n’est jamais gratuit… », ce vieil adage fait sans doute encore foi, et le fera même dans le futur!  La protection de ses données et de son identité virtuelle est par conséquent un autre gros chantier pour les prochaines années comme expliqué dans l’article « Demain : un monde sans vie privée »…

‽ Ce serait quoi, votre business modèle gratuit du futur? Et si vous repensiez votre chaîne de valeur et vos partenariats pour offrir des solutions gratuites à vos clients (type produits d’appel), tout en restant transparent et non intrusif ?