Conseil en innovation stratégique

Les préliminaires de la gymnastique de la (re)mise en mouvement

Innovation for Good (News) #32

Déjà 32 posts Innovation for Good (News) que Tilt ideas délivre tel a morning milkman ? Le temps passe vite, boudiou !

Confinés, contraints à explorer notre intériorité, à faire face à l’incertitude et l’anxiété, seule l’espérance d’un monde différent et meilleur « après » nous permet de trouver un sens à cette crise sanitaire. Et d’identifier les soi-disant règles à challenger de cette normalité qui portait déjà en elle les germes de la catastrophe (mondialisation effrénée non réglementée, désengagement de l’État, baisse des dépenses publiques de santé…). Mais qu’en est-il vraiment de notre capacité à changer durablement, individuellement et collectivement nos comportements et nos modes de vie ? Sommes-nous dépendants des lois de l’homéostasie – phénomène selon lequel la pression interne du biologique ou externe du système nous contraint à la stabilité, à l’équilibre, le plus souvent au travers d’un retour à un état antérieur ?

Il ne suffit donc pas de décréter ou d’attendre le changement pour qu’il s’opère. Il nous faut dès à présent penser l’après, nous mettre en mouvement pour créer les conditions du changement. Cette remise en forme – cette gym ou ce yoga managérial – c’est le rôle de l’innovation. Un peu tous les jours, sans attendre le 11 mai, et vous verrez, vous, individuellement et collectivement, irez mieux.

C’est l’objectif de la démarche NeoXygen initiée par Tilt ideas et dont l’objectif est d’aborder ce confinement non comme un temps de fermeture, mais comme un passage, avec ses rites, un espace de remise en question, une phase de transition vers un nouvel état du monde plus responsable (plus mature  ?). Pour ce faire, Tilt ideas étale sa confiture aujourd’hui avec le concept de liminarité1. et ses 3 étapes.

Dans ses travaux sur les rites de passage, l’anthropologue français Arnold Van Gennep identifie trois phases :

  • la phase de séparation durant laquelle l’individu est disjoint de son environnement et de son flot d’activités quotidiennes ;
  • la phase de liminarité (du latin limen qui signifie le seuil), aussi appelée période de marge, qui est la phase de transition durant laquelle l’individu se trouve entre deux états ou statuts (nous y sommes) ;
  • la phase d’incorporation qui marque la réintégration de l’individu dans son environnement avec une identité et un état modifiés.

C’est dans la phase de liminarité que se mettent en place les processus de déstructuration, de remise en question des normes, des repères, des valeurs et de l’identité (sociale, familiale, professionnelle…), mais aussi et surtout d’ouverture et de transformation de l’individu, ou d’un groupe d’individus, pour les conduire à un état modifié plus mature. Ces espaces d’expérimentation et de jeu (« daring microspaces ») permettent aux individus et aux entreprises de recombiner leurs savoirs et leurs pratiques, renégocier leurs identités, réinterroger leurs valeurs et leurs croyances. C’est parce que cette phase crée les conditions d’un changement profond et durable que le concept de liminarité est également repris, depuis une dizaine d’années, dans plusieurs disciplines. Dans le domaine du management et des organisations, il est utilisé pour étudier les modes de transformations et les processus d’adaptation des organisations et/ou des individus au sein des organisations. Cette dimension d’être « hors » est fondamentale à la liminarité et nous renvoie à la problématique même de l’existence, dont l’étymologie latine existere signifie « sortir de, s’élever de ».

Pour se remettre à exister, individus et entreprises vont devoir redéfinir des « communs », en termes de valeurs, d’identités et de principes éthiques et moraux pour faire primer l’esprit collectif, réduire les inégalités sociales et restaurer notre sentiment d’appartenance à une communauté humaine. Un esprit de communauté d’autant plus difficile à développer que nous savons été appelés à nous éloigner les uns des autres, et à voir l’autre comme une source potentielle de danger pour notre santé.

En second lieu, si la question du sens et de l’identité est fondamentale dans la liminarité des rites de passage, elle se pose aujourd’hui dans des conditions très spécifiques. En effet, le caractère inédit de la situation ainsi que l’ampleur et la gravité de la crise nous invitent à une réflexion et une remise en question profonde de nos modes de vie et de nos valeurs, mais sans que le sens ne nous soit donné ou incarné par l’institution ou l’autorité qui nous a placés en état de marge.

En d’autres termes, ni le sens ni la destination (ou l’état final après ledit changement) ne sont donnés, ni même déterminés par le politique, ce qui constitue une différence fondamentale par rapport aux rites de passage institués..

Sur le plan sociétal, la liminarité permet d’appréhender les transitions, au niveau macro et micro, en mettant l’humain au centre de la transformation. La liminarité se présente alors comme un moment clé où il nous faut démasquer le poids de l’idéologie et reconstruire notre éthique et les fondements moraux de notre société.

For Good ? Oui car tous les rites de passage ont toujours un « maître de cérémonie » sorte de coach de gym ou de yoga qui assure avec clarté et agilité une certaine guidance qui permet aux individus et collaborateurs de connaitre leur « destination », en lien avec leur processus de développement et de maturité.  Le Covid-19, révélateur du management ?

C’est ici que la prospective applique telle que nous la pratiquons chez Tilt ideas entre en jeu pour aider à définir cette vision, ce sens du futur, court et moyen terme par l’identification de scénarios

Vous en voulez encore ? Pour nourrir vos réflexions sur le monde d’après, assistez à nos webconférences en partenariat avec Unknowns.  94 se sont inscrits à celle du 30 avril, rendez-vous aux prochaines éditions les 7 et 14 mai prochains.

Brice Auckenthaler, co-fondateur, associé

 

1. Cette approche par la liminarité est également proposée par l’anthropologue danois Bjørn Thomassen qui, dans son livre Liminality and the Modern (2014), l’applique à la société entière pour étudier les périodes de transitions et de changements historiques suite à des révolutions, des guerres, des catastrophes naturelles ou encore économiques et politiques. Thomassen identifie trois niveaux de l’expérience liminaire : le niveau de l’individu, de la communauté et de la société ;  trois types de durée, à savoir : moment, période, époque. Sur le plan sociétal, la liminarité permet d’appréhender les transitions, au niveau macro et micro, en mettant l’humain au centre de la transformation. La liminarité se présente alors comme un moment clé où il nous faut démasquer le poids de l’idéologie et reconstruire notre éthique et les fondements moraux de notre société