Conseil en innovation stratégique

#Sociobang – Différence diagnostiquée

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Il y a quelques semaines, la chaîne M6 lançait une nouvelle série télévisée, Perception, qui raconte les enquêtes de Daniel Pierce, un professeur d’université schizophrène. Elle s’ajoute à la liste, de plus en plus longue, de séries et de films mettant en vedette, depuis quelques années, des protagonistes atteints de maladies psychiatriques, notamment d’autisme (souvent du syndrome d’Asperger) et de troubles bipolaires : The Best Offer (2013), Another Happy Day (2011), Homeland (2011-auj.) ou encore Mary & Max (2009).

Or, ce qui est fascinant dans cet “engouement”, c’est qu’il ne s’agit pas d’un engouement objectif, documentaire, scientifique si l’on peut dire, pour la réalité de ces troubles – extrêmement complexes et souvent graves – mais pour “une certaine idée” que l’on s’en fait, une idée positive, sublimée et bien loin de la réalité. L’autisme, dans ces films et séries, devient prétexte à montrer des gens originaux, créatifs et surdoués (Extremely Loud and Incredibly Close, L’Extravagant voyage du jeune et prodigieux T.S. Spivet) et la maniaco-dépression, le synonyme d’une vie brillante (deux biopics sur Yves Saint Laurent cette année). Cette dernière est effectivement en train de devenir “le mal du siècle” dans la presse, de nombreux articles s’intéressent aux capacités des surdoués ou vantent  les talents créatifs des autistes en entreprise. Le langage courant s’est imprégné de ce vocabulaire. Un père de famille, Timothee Archibald, a même consacré une exposition de photographies à son fils autiste. Et des tests psychologiques sur Internet vont même jusqu’à proposer un “diagnostic autiste” !

Dans un monde où la massification et Internet ont annulé l’illusion que l’on peut être différent, cette valorisation et cette interprétation populaires témoignent du degré suprême de l’aspiration à se sentir unique et ce, via l’argument scientifique et donc incontestable : “Je ne suis pas comme les autres. La preuve, ma différence est diagnostiquée.” C’est comme si le certificat médical était devenu le seul moyen d’être vraiment à part, original. L’on ne peut s’empêcher de penser à Nietzsche qui affirmait : “Les malades ont pour eux une sorte de fascination. Ils sont plus intéressants que les gens bien portants”, et vantait leur “génie”. En d’autres termes, même la maladie est devenue aujourd’hui un moyen de mettre en récit sa vie, de faire son self marketing, pour se valoriser. “Autism is cool” : un des nouveaux credo (aussi peu politiquement correct soit-il !) de notre époque.

Enfin, ces modèles culturels (dans un même sac, plus ou moins autistes/surdoués/bipolaires) traduisent l’évolution de l’aspiration à une originalité visible (l’habillement, les photos sur Facebook ou les comportements d’une tribu par exemple) vers une unicité intérieure, celle de la personnalité seule, ce que l’on peut mettre en parallèle avec le développement de nouvelles valeurs fortes telles que la déconsommation, le règne des expériences et la créativité.

‽ Nous cherchons toujours à nous sentir uniques : alors qu’Internet et la massification éteignent cet espoir, les marques doivent aider leurs clients à être différents “de l’intérieur”. Aidez-les, par exemple, à se responsabiliser, à s’engager, à vivre une expérience inédite… afin d’enrichir et de cultiver leur personnalité. En d’autres termes, offrez-leur le “certificat” de leur originalité.